mardi 1 avril 2008

Alain Bublex

"Les recherches d’Alain Bublex sur la réalité urbaine contemporaine s’inspirent de l’architecture utopique et visionnaire de la fin du siècle dernier. Bublex a entamé son projet actuel Plug-In City en 2000 et son concept s’inscrit dans le cadre du projet architectural imaginaire Plug-In City (la cité en mouvement) conçu en 1964 par l’architecte et urbaniste britannique Peter Cook. Provocateur et iconoclaste, Peter Cook, membre du groupe avant-gardiste Archigram, postulait dans Plug-In City une série de maisons et de routes, prêtes à l’emploi, interchangeables et finalement jetables, à reconfigurer ou déplacer par des grues en fonction des besoins fluctuants de la ville et de ses habitants. Comme bien des projets d’Archigram, idéalistes et porteurs de préoccupations sociales, Plug-In City se révéla aussi provocateur qu’irréalisable. Bublex considère néanmoins que les groupements de constructions préfabriquées partout présents sur les chantiers s’inscrivent en prolongement des idéaux du projet original de Plug-In City. Partant de cela, il imagine sa propre version d’une évolution urbaine utopique.

Terrie Sultan: Croyez vous en un idéal utopique qui puisse être atteint? Est-ce en fait une de vos aspirations ?
Alain Bublex: Au sens strict du terme, un idéal utopique est toujours achevé. Je crois que nous pourrions revenir un instant à la racine du mot utopie. Nous l’employons communément pour décrire des propositions particulièrement imaginatives ou anticonformistes et pour indiquer, pour souligner en fait, que celles-ci nous paraissent irréalisables. Ce n’est pas le sens originel du mot.
Une utopie est un modèle théorique, c’est une construction intellectuelle qui n’a d’autre objet que d’être matière à réflexion. C’est une condition importante. Cela signifie qu’un projet utopique est un projet qui est conçu volontairement sans aucun lien avec la réalité, il ne peut être que pure fiction. Il ne peut pas poser la question de sa réalisation sans perdre son statut d’utopie. Dès lors, cela exclut de l’utopie la plupart des propositions de l’architecture d’avant garde du XXième siècle et bon nombre d’autres propositions du champ social ou politique. C’est très important pour moi de poser sur ces projets un regard différent : ils ne sont pas utopiques parce que leurs auteurs ne nous les livrent pas comme des modèles de réflexion abstraite mais bien comme des propositions concrètes vouées à la construction, et ce, même si parfois leur faisabilité technique est plus que douteuse. Et c’est précisément ce point qui m’intéresse. L’écart perceptible entre le projet des auteurs et le statut dans lequel nous maintenons arbitrairement ces propositions."
texte tiré de la correspondance électronique entre Terrie Sultan et Alain Bublex, 2005.

mardi 25 mars 2008

Qui sommes-nous ?
Le 19 avril 2008 s’ouvrira la première édition de D2, une manifestation artistique proposée par l’association d’artistes LAPS dont, Séverine Verdan et Judy van Luyk, sommes les deux membres. Pour l’occasion, nous avons invité la jeune curatrice Katie Kennedy a se joindre à nous.

Que va-t-il se passer ?
Il va y avoir un investissemment de la commune par l’art. D2 offre la possibilité à des artistes d’investir un site de grande dimension leur permettant de choisir un lieu, un support, un moyen pour s’exprimer et d’entrer en contact avec les habitants.
La manifestation, qui va durer un mois, sera ponctuée par des performances et des actions qui seront annoncés au mois d’avril.

A qui D2 s'adresse-t-il ?
De part le lieu de l’intervention, la manifestation se veut être un connecteur logique entre l’art et la population, l’art comme interaction entre l’espace urbain et les citoyens. Nous ne cherchons pas à mettre en place une journée porte ouverte sur l’art, à créer des décorations urbaines mais, à réellement entrer dans la vie de la commune, à s’intéresser à ses citoyens.

Pourquoi la petite commune de Reignier?
Nous habitons toutes les deux à Reignier. Nous la vivons tous les jours. Nous en discutons donc souvent. Nous avons donc décidé de faire exister cette ville en temps et en espace, la transformer en un terrain d’expérimentation. Notre intérêt pour ce site réside dans son état de frontière, de liaison entre un pôle urbain et des zones plus rurales. En bref ce qui nous interesse est le péri-urbain. Son statut de transition nous semble intéressant et nous apparaît comme une niche de diversité à développer.

Pourquoi D2 ?
En fait, D2, c’est le nom de la route qui traverse Reignier, c’est son artère vitale, sa colonne vertébrale. A Reignier, tout est organisé autour de la Départementale 2. La manifestation en est une ramification, une ouverture. A travers ce titre, nous entendons l’idée de circulation, de flux, l’idée d’une ramification.

mardi 5 février 2008

Désolé mon grand, tu es trop petit
Reignier rêve d’un centre mais ne s’en donne pas les moyens. Au lieu de repenser son existant pour lui insuffler de la consistance, elle construit en masse, il lui faut du logement. Au sein de Reignier, le développement constant des zones de lotissement saumons banalise l’anti-personnalité. Tout le monde habite dans une même maison construite sur un modèle unique qur l’on pourrait considérer comme un bloc kit. En dehors de ces concentrations résidentielles mises en formes par des promoteurs,nous sommes aussi confrontés à des maisons individuelles récentes, construites toutes sur le même mode: un bloc principalement rectangulaire avec des fenêtres déjà pensées (le tout repéré et acheté à la foire du mieux vivre de la Roche-sur-Foron) puis placé sur un terrain. L’objectif de l’architecture n’est-elle pas de prendre en compte le terrain et la manière de vivre des futurs habitants? Le problème, me semble-til,est que dans une commune comme Reignier, les promoteurs immobiliers ont la charge de faire et défaire notre environnement. Le profit et la rentabilité sont au détriment de la personnalité et de l’humanité. Tout celà nous conduit vers un décor livide, fadace telle une tranche de jambon blanc sous vide de supermarché: un produit emballé prêt à être usé, un packaging fruité pour une réalité sans goût.

In situ
Pour nous, ce qui fait oeuvre, ce n’est pas seulement la pièce physique en elle-même, repérable comme telle (au sein d’un espace dit public), mais, l’ensemble des données qu’elle forme avec son environnement immédiat. L’oeuvre dans l’espace collectif ne peut alors que prendre en compte les paramètres intrinsèques au site. Nous pensons alors que seules l’étude et l’observation du site choisi permet une transformation temporaire de celui-ci.

Richard Sennett, propos recueillis par Thierry Paquot et Bernard Ecrement, Paris, novembre 1994.
«Nous ne créont dans [certaines] de nos villes que des espaces que j’appelle ‘inoffensifs’, neutres si vous préférez, des espaces qui dissipent la menace du contrat social [...] On ne cherche plus a doter un lieu d’une signification, d’un sens mais on cherche à le neutraliser. [...] Il ne raconte plus rien d’intéressant, on ne le regarde plus, il est insignifiant. Mais cette neutralisation est rassurante, elle dit au passant que rien n’arrivera.»
http://www.univ-paris12.fr/1134756867528/0/fiche article/

Reignier
Reignier, 5777 hab. (recensement réalisé en 2004)
410 m. d’altitude, 2508 hab./ km2
Haute-Savoie (Rhône-Alpes)

D’origine paysanne modeste, Reignier, soumise à la commerçante ville de la Roche-sur-Foron et tapie de la ‘prof-ombre’ de la rutilante Genève a attendu les premiers mouvements de rurbanisation des années 60 pour éclore. Elle a eu un développement récent et rapide qui ne lui a pas laissé de temps de construire ses monuments. Une architecture qui aurait pu lui insuffler un sentiment d’histoire, le visible d’une personnalité qui aurait évolué au cours des années. Seuls, l’église et le monument au mort (récemment déplacé), nous donnent une trace visible d’un hypothétique accompli.
Lors de son élévation empressée les maîtres mots ont été la rentabilité et l’efficacité. La problématique: construire des logements et faciliter le déplacement de la voiture. Pas seulement faciliter mais prôner les quatres roues, une réelle ‘adoration’ du déplacement rapide, de la transhumance des logeurs. Reignier n’est pas spécialement conçue pour y travailler, on y dort principalement.
L’urbanisme s’est concentré sur le déploiement du bitume et en second plan apparaît la ville ‘pansée’. On se trouve alors face à une commune au sein d’un noeud routier, organisée autour de la départementale 2. Reignier est une commune péri-urbaine dont toutes les fonctions sont séparées et rangées à leur place créant des micro-zones d’utilité précise délimitées, éclatées aux quatre coins de son étendue.